Vulgariser les arts pour favoriser l’accès aux contenus exposés

« En tant que bien symbolique, [l’œuvre d’art] n’existe comme telle que pour celui qui possède les moyens de se l’approprier, c’est-à-dire de la déchiffrer. »

— Pierre Bourdieu et Alain Darbel, L’Amour de l’Art : les musées et leur public, Paris, Éditions de Minuit, 1966.

Vous souhaitez encourager votre enfant à s’intéresser à l’art dès son jeune âge. Ça tombe bien, l’entrée de cette exposition locale qui a attiré votre attention est gratuite! On est samedi matin. Votre gobelet de café réutilisable à la main, vous êtes devant cette œuvre contemporaine avec votre enfant et vous aimeriez lui expliquer le message de l’artiste. Mais voilà, vous ne trouvez pas du tout les mots justes pour vulgariser cet univers complexe dans lequel vous le plongez.

Accessibilité des arts

L’accessibilité à la culture

Avoir accès à l’œuvre d’art, c’est être capable de se l’approprier, de la déchiffrer, et ça, ce n’est pas qu’une question de gratuité. Certains publics qui ne maîtrisent pas les codes et les valeurs esthétiques de l’art ont besoin d’être guidés pour pouvoir apprécier une exposition. Je pense naturellement au jeune public, au public famille et au public scolaire, mais aussi à tous les citoyens et citoyennes qui n’ont pas nécessairement l’habitude de fréquenter les musées ou les lieux de culture.

 

La médiation culturelle : un outil de démocratisation

La médiation culturelle crée un pont entre ces publics non avertis et la pratique de l’artiste, elle tente de trouver des moyens pour amener, entre autres, les enfants à s’intéresser aux contenus exposés de manière agréable. Un médiateur ou une médiatrice se questionne, anticipe les envies du public. Il ou elle conçoit des propositions originales qui aident les jeunes visiteurs et visiteuses à entrer en contact avec l’objet exposé, à mieux comprendre la pratique de l’artiste, mais aussi à acquérir des savoirs liés à l’exposition. Par exemple, à travers une visite-atelier, il ou elle peut encourager à la fois les enfants à découvrir l’exposition et à expérimenter la technique de l’artiste.

 

Mais qu’en est-il des familles qui visitent les expositions en dehors des moments dédiés aux activités de médiation organisées? Elles s’attendent elles aussi à une proposition qui est adaptée au niveau de développement et de connaissance de leurs enfants. Quelle stratégie peut-on alors développer pour améliorer l’expérience du public famille en tout temps? C’est la question que nous nous sommes posée au centre d’exposition où je joue le rôle de médiatrice culturelle.

Médiation indirecte [1] et vulgarisation des arts

Un outil d’interprétation peut prendre le relais du médiateur ou de la médiatrice et combler le fossé qui existe entre l’enfant et l’objet exposé. On parle alors de médiation indirecte. À travers du contenu écrit, le médiateur ou la médiatrice transmet non seulement des savoirs, mais favorise aussi cette rencontre « d’égal à égal » entre le public et l’œuvre d’art. L’objectif est de stimuler une interaction dynamique entre l’enfant, son parent et l’exposition. L’avantage ici, c’est que le visiteur ou la visiteuse est entièrement libre et autonome.

Comment rédiger et vulgariser les arts POUR l’enfant

Pour convenir au public famille, un outil d’aide à la visite devrait être centré sur l’enfant et non sur le média d’exposition. Lorsque le ou la jeune se retrouvera devant les œuvres, qu’est-ce qui l’intéressera, qu’est-ce qui attirera son attention? Quelles questions lui viendront à l’esprit?

Typographie, phrasé, mots, mise en page : tout doit être choisi dans l’objectif d’intéresser l’enfant. Je rédige toujours ces outils en m’adressant clairement et simplement au petit ou à la petite qui découvre un monde nouveau. J’utilise des mots simples, je fais des phrases simples et je vais droit au but. J’évite les mots techniques et le jargon spécialisé. Si j’utilise un mot que je crois que l’enfant ne comprendra pas, par exemple installation ou estampe, je l’explique ou je compare cette nouvelle réalité à quelque chose de concret qui lui est familier.

Le plaisir avant tout

En médiation culturelle, je tente toujours de privilégier le plaisir, donc je n’emploie pas exclusivement un ton pédagogique. Je m’efforce de créer des outils ludiques et interactifs. S’adresser directement à l’enfant m’apparaît essentiel pour que celui-ci ou celle-ci ait envie de s’impliquer dans sa visite. Sur un ton léger et amical, je pose des devinettes et des questions qui soulèveront la discussion avec son parent, qui le forceront à circuler dans la galerie à la recherche de la clef de lecture et d’interprétation des œuvres. L’idée, c’est que l’enfant demeure actif mentalement et physiquement pendant sa visite.

Simple ne veut pas dire imprécis

Même si le texte est destiné aux enfants, des adultes aussi le liront. Vulgariser un univers artistique, c’est le simplifier, le rendre plus concret et plus compréhensible pour un public non averti. Ce n’est pas en proposer une vision simpliste. Je pense que c’est seulement en restant fidèle aux idées et à la réalité de l’artiste qu’on peut favoriser l’accès à son monde fascinant.


[1] La médiation indirecte, ou la médiation « support » concerne les documents écrits qu’on propose au visiteur réel ou potentiel.

Vous êtes artiste ou acteur du domaine culturel et aimeriez en savoir plus sur les services de vulgarisation de Pluma Noctua ?

Références

Fauche, A. La médiation scientifique et culturelle de musée, https://docplayer.fr/918469-La-mediation-scientifique-et-culturelle-de-musee.html

Malavoy, S. (2019). Guide pratique de vulgarisation scientifique (2e édition). Acfas Éditions, Faire avancer les savoirs.

Poli, M.S. (2010). Le texte dans l’exposition, un dispositif de tension permanente entre contrainte et créativité. La Lettre de l’OCIM, Musées, Patrimoine et Culture scientifiques et techniques, 132, 8-13. https://doi.org/10.4000/ocim.377

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